Isolement lors des parties, hyper-sexualisation des personnages feminins, banalisation du viol dans les scenarios. Voila a quoi seront confrontees la plupart joueuses de jeu de role.
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«Nous etions aux prises avec des malfrats. J’etais la seule cousine du groupe, et j’ai fini a terre, avec un type occupe i commencer a me deshabiller.» Tamara est une roliste de 29 annees. La scene qu’elle decrit semble s’i?tre deroulee au cours de la partie de jeu de role. Dans ces jeux, chaque joueur ou joueuse incarne 1 personnage. Imaginez que vous etes le protagoniste de la intrigue racontee via un narrateur, le maitre du jeu. A voix haute, vous decrivez toutes vos actions, vous dialoguez au milieu des autres personnages –les autres joueurs et joueuses– et vous faites avancer l’histoire dans le sens que vous voulez. Sauf que pour les joueuses comme Tamara, leurs histoires incluent souvent des viols, des techniques de viols, des agressions sexuelles.
Banalisation du viol
Marion a 15 annees quand elle devient roliste. Avec des amis –tous masculins– ils decident de faire une partie de Chtulhu: le scenario se marche dans les annees 1920, ils menent une enquete sur des faits mysterieux. L’ambiance tres noire, lugubre, ainsi, le surnaturel va apparaitre a tout moment. Le but, en general, c’est de se Realiser peur entre copains. Marion a fini en pleurs. Mais gui?re a cause des monstres du jeu. «J’ai fini via fondre en larmes, parce que notre personnage allait se Realiser violer. J’ai refuse categoriquement, mais les autres joueurs me disaient “c’est Chtulhu, on voit toujours de la violence, ou des morts”. Mais c’est tres different de jouer un personnage gravement blesse, que de se retrouver a incarner une femme qui vient de devenir violee.» Apres un long moment d’argumentation, elle a fini par obtenir gain de cause.
«On envoyait notre personnage montrer ses seins pour obtenir des informations. En fera, j’endossais tres vite le role d’une prostituee, que je le veuille ou non.»
«La banalisation du viol est reguliere. Il semble traite avec autant de consideration qu’un vol a l’etalage. C’est souvent en mode “on s’en fout, c’est qu’un jeu, on fera ce qu’on veut, donc je viole la fermiere et ses deux filles”», raconte Moira, meneuse de jeu. Et quand il ne vise gui?re les joueuses en particulier, il va toucher les personnages feminins secondaires –ceux qui ne sont jamais incarnes avec nos joueurs. Amandine se souvient de cette partie, ou, apres avoir interroge une vieille dame, un des joueurs autour en table a lache 1 «bon elle sert a pas grand chose, on la viole».
Ces manifestations de sexisme dans la narration n’ont nullement surpris Come Martin et Eugenie Bidet, membres du collectif Et pourtant elles jouent, un blog qui publie des temoignages de joueuses racontant le sexisme du jeu de role. «Il n’y a pas de raison que le sexisme soit pire ou moindre dans le jeu de role que dans le reste de la societe. En revanche, il va i?tre interessant de noter que le sexisme www.datingmentor.org/fr/kasidie-review y prend la plupart formes qui sont propres a cette culture cela media. Il y a votre culture geek majoritairement a destination des hommes heterosexuels, avec des personnages feminins coinces entre la soigneuse et la seductrice, la misogynie des univers medivaux-fantastiques sous pretexte de realisme, le viol des personnages feminins comme ressort narratif passionnant.»
Plusieurs personnages feminins dedies a toutes les soins ou a toutes les charmes, Sylvie a subi les deux: «Dans une partie ou je jouais une infirmiere, des autres joueurs ont l’ensemble de decide qu’ils m’imagineraient en infirmiere sexy, meme si ce n’etait pas la description que j’en avais faite.» Marion aussi se souvient de cette sexualisation constante. «On envoyait mon personnage montrer ses seins pour obtenir des renseignements. En fera, j’endossais tres vite le role de la prostituee, que je le veuille ou non.» Alors i§a a developpe des strategies. «J’ai change, pour nos rendre moins sexualisable. J’ai joue des enfants, ou des femmes tres tres musclees, car ce n’etait nullement considere comme sexy via les autres joueurs.» Toutes ne trouvent aucune solutions. Diraen a 37 annees, et si elle a forcement pu jouer avec serenite, votre n’est pas l’eventualite de ses amies rolistes. «Certaines ont meme abandonne l’idee de jouer des personnages feminins», a force de devenir sexualisees, humiliees, ou de subir des reflexions genantes.
La «copine du roliste»
Qui plus est du sexisme present au sein des scenarios, les joueuses doivent quelquefois faire face a celui de leurs partenaires de jeu. Une roliste raconte une de l’ensemble de ses pires parties, ou elle etait Notre seule cousine. «Je n’arrivais gui?re a en placer une. Chaque fois que j’essayais de participer a une discussion au coeur du groupe, j’etais mise a l’ecart, chacune de mes idees est rejetee en bloc. Je n’etais qu’une figurante.» De colere, cette dernii?re a quitte la table. Alors evidemment, ces experiences changent selon ou et avec qui on joue: en famille, en club, ou lors de convention –l’equivalent roliste tout d’un festival de musique. «Certains cadres paraissent moins “safe” que d’autres, Afin de differentes raisons», explique Coralie David, editrice de livres de jeu de role. «En conventions, on a avec des gens qu’on ne connait jamais, on ne sait nullement comment ils ont la possibilite de se comporter. En club, il va y avoir des jeux de pouvoir qui peuvent depasser les bornes, couple a un effet de groupe de mecs. On a eu des echos de bizutages qui consistait au viol du personnage au sein d’ une partie.» Cette ambiance pousse quelques joueuses a designer scrupuleusement leurs partenaires de jeu. «D’autres choisissent d’arreter de jouer apres 1 demenagement notamment, car elles ne retrouvent pas de cadre sur», deplore l’editrice.
Des participants et participantes au jeu de role «La conquete de Mythodee» pres de Brokeloh, en Allemagne, le 2 aout 2018. | Peter Steffen / DPA / AFP
Pour d’autres, le sexisme passe via une remise en question de un capacites a jouer. Axelle Bouet, roliste, blogueuse et autrice de jeu de role l’explique ainsi: «Le joueur de jeu de role moyen a mode a voir les joueuses comme des “copines de rolistes”, comme si elles ne pouvaient gui?re jouer de leur propre chef. Et le pire, c’est si on annonce qu’on reste meneuse de jeu. La reponse est souvent un “pardon?” incredule, suivit d’un interrogatoire sur les savoirs des regles. Chose qui n’arrive pas a 1 homme.» Moira, petit soeur trans, a egalement constate une telle remise en cause de ses connaissances de meneuse de jeu. «Tant que j’etais percue tel votre homme, je me sentais parmi les pairs. Mais maintenant, a mois de devenir a une table majoritairement constituee de jeunes femmes, J’me sens comme une anomalie dans un milieu traditionnellement masculin.» Ces manifestations ne semblent gui?re bien particuliers au monde roliste, mais il va i?tre d’autant plus notable que des joueuses y sont encore en minorite virtuel.